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lundi 7 octobre 2024
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Inondations à Abidjan : Ces zones où ne pas habiter

Chaque année, les fortes précipitations causent de nombreux dégâts matériels, mais surtout des décès dans des zones dits à risques du district d’Abidjan. La période des grandes pluies n’est pas de tout repos pour le gouvernement.

A côté des jolies tours du Plateau et des beaux quartiers de Cocody, existent à Abidjan des zones d’habitation exposées aux sinistres. Surtout en saisons de pluies. Il s’agit des quartiers où chaque pluie qui tombe draine avec elle son lot d’éboulements, de morts par noyade, d’effondrement d’habitations et de malheurs. Cette année, les pluies qui se sont abattues sur la capitale économique ivoirienne ont déjà fait plus d’une dizaine de morts. Que ce soit Cocody, Abobo, Yopougon, Attécoubé, …toutes les communes du district d’Abidjan ont des zones à risques identifiées où il vaut mieux ne pas habiter.

Il s’agit, pour la commune d’Adjamé, du site « Bracodi », au niveau du pont piéton. A Attécoubé, les sites « Agban-Attié » et « Mossikro » ont été identifiés comme étant à risque. A Anyama, il s’agit des sites « Pmfa village » et « Abbeh-Broukoi ». Quatre sites ont été identifiés à Abobo, à savoir « Clouetcha » 1 et 2, « Abobo désert », « Banco » et « Avocatier dépôt 9 ». La commune huppée de Cocody n’est pas épargnée. Dans la cité du maire Jean Marc Yacé, les cités « Akouédo », « Jacques Prévert », « Laurier » 9 et 15 sont concernées. Du côté de Port-Bouët, les sites à risques sont « Tobiato » et ses sous-quartiers qui s’étendent sur 2,5 kilomètres et « Benogosso », dans le quartier de Gonzagueville. La commune de Yopougon n’est pas en reste, avec les quartiers « Camp militaire », « Banco » et « Bouguinisso », situé à la sortie de ladite commune, en allant à Songon. Enfin, à Bingerville, les quartiers « Gbagba », « Pont Dougou » et « Carrefour CME » ont été identifiés. Ces zones ont été listées par le ministère de l’Hydraulique, de l’Assainissement et de la Salubrité, en collaboration avec tous les ministères membres du Comité interministériel en charge de la prévention des catastrophes, les services techniques des communes du District d’Abidjan et les structures spécialisées en gestion des catastrophes. Il s’agit notamment de l’Office National de l’Assainissement et du Drainage (ONAD), de  l’Office National de la Protection Civile (ONPC), du Bureau National d’Etudes Techniques et de Développement (BNETD). À ces structures, il faut ajouter le Groupement des Sapeurs-Pompiers Militaires (GSPM) et la Société d’Exploitation et de Développement Aéroportuaire, Aéronautique et Météorologique (SODEXAM).

Cette année, en prélude à la saison des pluies, le ministre de l’Hydraulique, de l’Assainissement et de la Salubrité, Bouaké Fofana, avait insisté sur les dangers certains que courent ceux qui y habitent. Un plan de déguerpissement avait été arrêté dans la foulée pour minimiser l’impact des pluies sur les populations. Une opération de déguerpissement sécurisée par les Forces de défense et de sécurité, la Brigade de l’Assainissement et de la Salubrité et les Polices municipales des mairies du District d’Abidjan.

Cette opération, il faut en convenir, n’est pas la première édition de ce processus de déguerpissement, tout comme les zones indexées ne sont pas nouvelles. Elles sont connues, depuis quelques années, pour être des zones hautement dangereuses pour ceux qui y habitent, en saison des pluies.

Il s’agit de zones qui ne sont pas viabilisées, mais qui ont été colonisées par les populations, sous le double effet de l’urbanisation et de la démographie galopante. Dans certains quartiers, des immeubles ont été réalisés dans les bassins d’orage et sur les ouvrages d’assainissement et de drainage. Ailleurs, les caniveaux et ouvrages ont été obstrués et ensablés, de sorte que le système d’évacuations des eaux de pluies peine à bien fonctionner. Dans d’autres cas, des quartiers sont carrément construits sur des flancs de colline.

« Sous les effets conjugués des changements climatiques, de l’urbanisation difficilement maîtrisée, en partie du fait de notre indiscipline, les saisons de pluies riment de plus en plus avec des drames, des inondations, des destructions de biens mobiliers et immobiliers, et malheureusement des pertes en vies humaines. L’essentiel des drames (95%) surviennent et sont concentrées dans des zones occupées et habitées illégalement pour une large part, car elles ne sont pas aménagées pour accueillir des populations », déplore le ministre Bouaké Fofana.

Quid de ceux qui partent

L’opération de déguerpissement, hormis les aménagements des sites impactés, va s’étendre sur tout le deuxième semestre de l’année 2022, pour un coût global de 2,5 milliards de FCFA. Il va concerner quelque 4.000 ménages résidents, dans les 13 communes d’Abidjan, soit à peu près 25 000 personnes. « On a défini un périmètre de 30 mètres autour de ces zones-là. Ce sont des personnes qui doivent y aller maintenant. Pour ces personnes-là, nous allons trouver des solutions provisoires », précise le ministre. Il  affirme l’engagement du gouvernement à assister les populations impactées par les opérations de déguerpissement, annonçant des mesures d’aménagement des zones à risques pour éviter la recolonisation des sites libérés. Quant à la question de savoir si les populations déguerpies seront relogées, le ministre de l’Hydraulique, de l’Assainissement et de la Salubrité, a été clair : rien ne sera fait. « Nous ne voulons pas recommencer ce scénario, c’est pour cela qu’il n’est pas prévu de reloger avant les départs », clarifie-t-il.  Avant d’ajouter que « l’objectif de cette opération est de vraiment sauver des vies ». Bouaké Fofana invitera les populations habitant ces zones à risques à les quitter, tout en assurant qu’une fois qu’elles seront parties, « tout est discutable et tout est négociable ». « Une fois qu’on est parti, on pourra discuter de toutes les mesures d’accompagnement possibles », promet-il.

Trouver des solutions durables

Le risque, avec les annonces du gouvernement et les promesses des années passées, c’est que cette opération de déguerpissement se trouve finalement être un coup d’épée dans l’eau. Chaque année, en effet, avant la grande saison des pluies, le gouvernement lance une campagne de communication doublée d’une opération de déguerpissement, officiellement pour « éviter des morts ». Ce qui n’empêche pas le pire de se produire, car après la saison des pluies, les mêmes zones sont à nouveau prises d’assaut par les populations.

Il faudra, pour le gouvernement, trouver des solutions durables à cette problématique. S’il est difficilement possible d’éviter que la pluie ne fasse des dégâts, il est en revanche possible de limiter les conséquences de ces précipitations sur la vie des populations. Cela est envisageable, en mettant en place un plan de relogement des personnes déguerpies des zones à risques. Sinon, l’État devra interdire l’accès de ces sites aux populations déguerpies ou  viabiliser lesdites zones à risques, à l’effet de les rendre habitables. 

M’Bah Aboubakar

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