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lundi 10 février 2025
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École Ivoirienne : Les grands défis

Lancés le 19 juillet 2021, les Etats Généraux de l’Education Nationale et de l’Alphabétisation (EGENA) doivent déboucher sur des propositions concrètes pour l’éclosion de la nouvelle école ivoirienne. Un état des lieux de la situation s’avère nécessaire, avant d’entreprendre toute réforme.

Ces Etats Généraux de l’Education Nationale et de l’Alphabétisation (EGENA) visent, selon le gouvernement qui les a initiés, « à contribuer à construire un pacte social durable en faveur d’une école ivoirienne centrée sur la réussite des élèves et l’appropriation des valeurs ». En d’autres termes, il s’agit de susciter l’adhésion des membres de la communauté afin d’élaborer « un nouveau pacte social et d’excellence autour de l’école pour réaffirmer l’importance des enjeux éducatifs et replacer la réussite de l’apprenant au cœur de toutes les actions éducatives ».

Au sortir des concertations nationales qui ont impliqué les acteurs sociaux et techniques, un état des lieux du système éducatif a été dressé, qui identifie les problématiques du secteur.

De nombreuses lacunes

Selon les rédacteurs du « Rapport de synthèse des concertations nationales » des EGENA, les faiblesses du système éducatif en Côte d’Ivoire découlent de plusieurs facteurs. Ils citent, entre autres, l’insuffisance des ressources – humaines, matérielles et financières – dédiées à la prise en charge des populations vulnérables ou présentant des besoins spécifiques et l’insuffisance des ressources humaines, matérielles, des infrastructures nécessaires pour garantir un enseignement de qualité. Ils indexent, en sus, la faible appropriation des approches pédagogiques par les enseignants – ce qui revient à parler de la formation des enseignants eux-mêmes, quant aux techniques de transmission du savoir – ainsi qu’une répartition inégale des personnels enseignants sur l’ensemble du territoire national.

Le rapport pointe également du doigt la « précarité persistante des conditions de travail et de vie des enseignants du secteur public, notamment les nouveaux enseignants et stagiaires ». Ce qui contribue à la baisse de la qualité des enseignements. Un autre aspect pris en compte pour expliquer les faiblesses du système éducatif est relatif aux coûts de scolarisation élevés pour les ménages qui, selon les chiffres consultés, contribuent à en croire les spécialistes, à hauteur d’un tiers, aux dépenses globales d’éducation.

Les lacunes des dispositifs et programmes d’apprentissage tout au long de la vie, l’insécurité et l’insalubrité dans l’environnement scolaire, les procédures de paiement longues et complexes (en ce qui concerne les bourses et autres aides financières, budget de fonctionnement, frais de scolarité au sein d’établissements privés, rémunération des corrections d’examens), figurent également au nombre des maux qui handicapent sérieusement le système éducatif ivoirien.

Les forces du système éducatif ivoirien

Même si elle est de plus en plus décriée – surtout ces deux dernières décennies – l’école ivoirienne bénéficie néanmoins d’un environnement qui permet d’obtenir des résultats. Il en va du cadre institutionnel régissant le paysage éducatif ivoirien et de l’existence de cadres juridiques, réglementaires et institutionnels autour du fonctionnement des services du Ministère de l’Éducation Nationale et de l’Alphabétisation (MENA). En outre, plusieurs accords de coopération – régionaux et internationaux – aident le système éducatif ivoirien à atteindre les normes internationales. Les rédacteurs du rapport de synthèse saluent l’existence d’un cadre pédagogique qui planifie l’offre éducative, encadre le rôle des acteurs, propose des profils d’enseignants selon les compétences et la déontologie et assure une articulation logique entre la politique éducative, les programmes d’enseignement et les pratiques pédagogiques. Ce sont ces outils indicateurs, parmi tant d’autres, qui sont mis en évidence pour relever les forces du système éducatif.

Orienter le changement…

Si l’enjeu de ces EGENA est de permettre à l’école d’assurer de manière harmonieuse ses différentes missions, les experts estiment qu’elle ne peut réussir que si elle repose sur des fondements précis. Ils citent la socialisation et l’éducation aux valeurs dans une double dimension nationale et universelle, l’enseignement, l’apprentissage et le développement culturel, la formation et l’encadrement, la facilitation de l’intégration économique, sociale et culturelle et le vivre-ensemble, la recherche-action et l’innovation. Cependant, nuancent les rédacteurs du rapport, pour mener ces missions à bien, les établissements devront respecter les principes d’enracinement, d’ouverture et de résilience, d’équité et d’égalité des chances, de qualité pour tous, de promotion de l’individu et de la société, d’un leadership efficace et surtout de contexte apaisé.

Ils proposent de ce fait une théorie dite du changement qui, selon ses concepteurs, implique des liens entre les intrants, les résultats et les impacts finaux. Cette théorie repose sur cinq points cardinaux interdépendant: les politiques en matière d’éducation, la coordination institutionnelle, les ressources humaines et matérielles, le financement et les données probantes.

…pour une école de qualité

« Pour changer la donne au sein des systèmes d’enseignement, nous devons tous rompre avec certaines pensées, pratiques et mentalités défavorables à la promotion d’une école de qualité », estiment les experts. Il s’agit ainsi, développent-ils, de changer de regard sur l’institution scolaire, et de renouveler les modèles, en promouvant un changement radical de mentalité et de comportement dans l’ensemble de la société, notamment auprès des acteurs des systèmes scolaires (familles, élèves, personnels enseignants, administratifs et d’encadrement, et communauté).

Dans la foulée, plusieurs propositions sont faites, pour (re) donner à l’école ses lettres de noblesse. « Au regard des événements sociopolitiques de ces dernières décennies qui ont entraîné le système éducatif sur des chemins d’incertitude et d’instabilité, des dispositions doivent être prises pour faire de l’école un espace neutre, à distance égale des différentes entités politiques, dans leurs combats pour la conquête ou la conservation du pouvoir d’État », conseillent les experts. Ils ajoutent qu’il importe, à cette fin, d’interdire tous les groupements associatifs à caractère politique, en milieu scolaire.

« Pour la Côte d’Ivoire qui vise à devenir un État émergent, l’atteinte de cet objectif n’est toutefois possible qu’à travers la construction d’un système scolaire performant. Au regard du rôle accélérateur de l’école, il convient de considérer certains éléments comme prioritaires, entre autres : les politiques d’extension ou de diversification des offres éducatives, la construction d’établissements et d’infrastructures d’accueil de l’administration scolaire, ainsi que le recrutement et la formation de ressources humaines de qualité », assurent les experts. « Par ailleurs, il est indispensable de doter les structures scolaires publiques de moyens matériels et financiers conséquents, d’ouvrir des internats prenant en compte les problématiques de genre sur l’ensemble du territoire et de régler à temps les montants dus aux fondateurs d’établissements privés », concluent-ils

M’Bah Aboubakar

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