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dimanche 12 mai 2024
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Sécurité : 8000 accidents du travail par an

L’accident survenu à la zone industrielle de Yopougon en juin 2023 a remis au goût du jour la question des accidents du travail. Selon les statistiques livrées par les autorités, plus de 8000 accidents du travail se produisent annuellement en Côte d’Ivoire. 

La Caisse Nationale de Prévoyance Sociale (CNPS), l’institution chargée de gérer le régime obligatoire de prévoyance sociale du secteur privé en Côte d’Ivoire, a enregistré plus de 8.000 accidents du travail dans le pays en 2022. Cette information, lâchée le mercredi 26 avril 2023 par Idriss Traoré, le Directeur Général Adjoint de la CNPS chargé de l’Exploitation, à l’occasion de la double célébration par la CNPS de la 27e journée africaine de la prévention des risques professionnels (JAPRP) et de la 21e Journée mondiale de la santé et de la sécurité au travail, lève le voile sur un tueur silencieux qui mine l’environnement professionnel.  

Dans une déclaration publiée le 28 avril 2023, le ministre de l’Emploi et de la Protection sociale, Adama Kamara, indiquera que les charges de réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles s’élèvent chaque année à plus de huit milliards FCFA. « Le nombre de cas d’accidents dans le pays est bien au-delà de ces chiffres qui ne prennent pas en compte les travailleurs de l’économie informelle et ceux du secteur public », a néanmoins précisé le membre du gouvernement. Sur son site internet, la Société Ivoirienne de Médecine du Travail (SIMT) indique que l’on dénombre dans le secteur formel de nombreux accidents du travail et maladies professionnelles dont l’ampleur réelle demeure sous évaluée. « Dans le secteur privé formel, l’on a dénombré 8291 accidents du travail, 18 maladies professionnelles reconnues en 2007 par la CNPS avec un coût de réparation chiffré à 2 milliards 132 millions de francs CFA », indiquent les médecins du travail. Ils ajoutent que « dans la fonction publique, les statistiques ont indiqué en 2006, 37 accidents du travail dont 10 mortels et 21 maladies contractées en service » et que « les statistiques concernant l’économie informelle ne sont pas disponibles ».

Les données ainsi divulguées par le ministre de l’Emploi et de la Protection sociale,  le Directeur Général Adjoint de la CNPS et les médecins du travail montrent l’ampleur d’un problème qui attend toujours de trouver une solution effective. « Lutter contre ce fléau reste un enjeu majeur pour notre pays », a galvanisé Adama Kamara, qui a ajouté que le gouvernement mettra tout en œuvre pour tenir son rôle dans la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles.

C’est quoi un accident du travail

En Côte d’Ivoire, la législation considère comme accident du travail l’accident survenu à un travailleur, quelle qu’en soit la cause, par le fait ou à l’occasion du travail. L’accident de trajet, c’est-à-dire l’accident qui survient pendant le trajet de la résidence du travailleur au lieu de son travail et vice versa dans la mesure où le parcours n’a pas été interrompu ou détourné pour un motif personnel ou indépendant de son emploi est également considéré comme accident du travail, tout comme l’accident survenu pendant les voyages dont les frais sont à la charge de l’employeur, en application du code du travail (mission, recrutement, déplacement…).  

Quant à la maladie professionnelle, c’est une maladie contractée par le travailleur exposé de façon habituelle à l’action de certains agents nocifs dans l’exécution de son travail. Elle doit figurer sur la liste des Maladies Professionnelles prévue par les textes. 

Impact sur les économies nationales

Les accidents du travail et des maladies professionnelles impactent négativement les économies des Etats et leur développement. Les dernières statistiques de l’Organisation Internationale du Travail (OIT), indiquent que chaque année, plus de 374 millions de travailleurs sont victimes d’accidents non mortels sur leur lieu de travail. La même source révèle qu’environ 7.000 personnes décèdent quotidiennement des suites d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, soit 2,8 millions de décès par an. En Afrique subsaharienne, ce sont environ 20% de ces accidents du travail et maladies professionnelles qui se produisent. L’OIT estime à cet égard que 4% du Produit Intérieur Brut (PIB) mondial, soit 2.800 milliards de dollars, sont affectés chaque année aux dépenses en rapport avec la perte de temps de travail, les interruptions de production, les soins médicaux, la réadaptation et l’indemnisation des victimes.

Des barrières à franchir

Selon les médecins du travail, le système de santé et sécurité au travail en Côte d’Ivoire bien que codifié connait des difficultés aussi bien dans sa conception que dans sa mise en application. « Les conventions les plus pertinentes dans le domaine de la santé et sécurité au travail n’ont pas été ratifiées par la Côte d’Ivoire. C’est le cas de la convention 155 concernant la sécurité et la santé des travailleurs, la convention 161 sur les services de santé au travail et la convention187 sur le cadre promotionnel pour la sécurité et la santé au travail », font remarquer les membres de la SIMT. Ils ajoutent que « les dispositions les plus actuelles et les plus adaptées dans le domaine de la sécurité et santé au travail ne sont pas prises en compte dans la législation nationale (tiers temps pour le médecin de l’entreprise en vue de la surveillance du milieu du travail, législation sur les produits chimiques…) ». 

Pour les spécialistes de la santé du travail, il importe d’élargir le champ d’application des prestations liées à la sécurité et la santé au travail, celles-ci étant souvent limitées à la pratique de la médecine curative, à la souscription à une assurance maladie ou à une convention de soin avec un établissement de santé. La surveillance de la santé des travailleurs et du milieu de travail, en rapport avec le risque professionnel, est quasiment inexistante.

Pour la SIMT qui organise en novembre 2023 son 3e congrès scientifique, il importe d’augmenter le nombre de spécialistes de santé au travail qui exercent dans les entreprises, de prévoir des formations diplômantes pour les infirmiers et surtout de densifier les services de sécurité et santé au travail, disponibles dans peu d’entreprise du secteur privé formel et quasi inexistants dans le secteur public

M’Bah Aboubakar

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