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samedi 15 février 2025
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Maladies neurologiques: Ces nourrissons et adolescents victimes des AVC

Si l’Accident Vasculaire Cérébral (AVC) touche majoritairement les adultes en Côte d’Ivoire, les experts estiment cependant qu’environ 1,2/ 100.000 enfants âgés de 1 mois à 20 ans sont concernés par la maladie. Les adultes sont 10 à 12 fois plus affectés par la maladie que la population pédiatrique (0-20 ans). Des solutions médicales existent pour prévenir et traiter le mal.

À neuf mois, le nourrisson de dame Fofana Z. a été victime de l’AVC. « À sa naissance, mon bébé allait bien. C’est par la suite qu’il a fait l’AVC. Les médecins étaient étonnés à l’époque parce qu’ils disaient qu’ils n’avaient pas encore vu un nourrisson faire cette maladie. C’était en 2013», relate-t-elle, la voix émue. Chantal Gnahouo, présidente de l’Ong Espoir se souvient également de trois enfants de 1, 4 et 6 ans que lui ont recommandés des médecins des CHU, en 2023. « Ce sont des enfants dont les parents sont démunis. Nous avons contacté le service social de l’Hôpital mère-enfant de Bingerville qui a pris en charge le scanner et l’Imagerie par Résonance Magnétique (IRM) de ces enfants malades», se félicite-t-elle. Professeur Mariam Doumbia-Ouattara, neuropédiatre, a confié au journal Le TamTam Parleur que « Certaines études montrent que les périodes néonatales (moins de 28 jours après la naissance) et de la petite enfance (de 1 à 5 ans) sont les moments où le risque de faire l’AVC est légèrement plus élevé ».

Des signes annonciateurs d’un AVC

Bléa C., rencontrée mercredi 22 octobre 2024 dans la salle d’attente du service de neurologie, est venu au Centre Hospitalier Universitaire (CHU)  de Treichville, accompagnée de sa fille de six ans. Ils occupaient un des grands sièges en bois, dans le vestibule de ce service composé de trois pièces: deux salles de consultation  et un secrétariat. Selon ses explications, les signes de l’attaque cérébrale se sont manifestés sous forme de raidissement du corps qui dure moins d’une minute. Les premières crises se sont produites, le 15 mai 2024. Ces crises épileptiques survenaient en moyenne trois fois par jour, pendant une période de deux semaines. Lors d’une consultation précédente, à l’Hôpital communal de Koumassi, le médecin a diagnostiqué une anémie et il a recommandé un scanner qui n’a rien révélé. Quant à dame Fofana, la maladie s’était déclenchée chez son nourrisson, né le 20 août  2012, par une paralysie du côté gauche du corps et un taux élevé de Protéine C. Réactive (CRP, abrégé en anglais), marquant l’inflammation, détectée par le Dr Cissé Lanciné. La prise en charge de l’ enfant a été un parcours du combattant pour la mère qui a consulté plusieurs médecins: la Clinique Liberté à Adjamé, les CHU de Cocody, de Yopougon et de Treichville, etc. C’est finalement lors de sa consultation chez professeur Doumbia-Ouattara, première spécialiste en neuropédiatrie, que l’AVC a été diagnostiqué, le 25 mai 2013. Plus tard, le mal a été aggravé par des crises d’épilepsie post-AVC. 

Le cas de l’enfant de dame Koulaï D. est évocateur. Né drépanocytaire de type SS, l’adolescent de 11 ans était prédisposé à faire des maladies. Sa mère se souvient que son garçon se plaignait de maux de tête et de migraines constamment. L’hématologue qui le suivait depuis la naissance a prescrit une photophorèse et un scanner transcrânien. Un rendez-vous a été pris à la Polyclinique internationale Sainte Anne-Marie (Pisam) pour faire l’examen de scanner, le 9 septembre 2024. « Mon fils se plaignait d’un mal de tête persistant, le 6 septembre 2024. J’ai mis sa tête sur mes pieds parce qu’il avait sommeil. Sentant qu’il n’allait pas bien, je l’ai appelé, mais il n’a pas répondu. Alors j’ai crié fort son nom, car j’étais inquiète. Il ne répondait pas toujours; il avait sombré déjà dans un coma », relate la mère. Elle ajoute qu’elle s’est rendue à La Clinique Médicale Vie de Port-Bouet où son fils a été admis en réanimation. Il a fait un scanner qui a révélé un AVC ischémique. 

Les causes des AVC pédiatriques

On parle d’AVC ischémique, lorsque l’artère du cerveau, apportant le sang riche en oxygène et nutriments, se bouche. Professeur Mariam  Doumbia-Ouattara note que chez les sujets de moins de 10 ans, 15% des causes de l’AVC ischémique sont liés aux cardiopathies ou maladies du cœur. La praticienne ajoute que 10 à 15% de ce type d’ AVC chez les moins de 10 ans sont dus à la drépanocytose, aux troubles de coagulation et 25% sont liés à des causes dites indéterminées. Le deuxième type appelé AVC hémorragique est provoqué chez cette catégorie d’enfants par une rupture de petites artères à l’intérieur du cerveau, causant une entrée du sang soudaine dans celui-ci. « Les AVC hémorragiques chez les moins de 10 ans sont causés par des malformations vasculaires. Ils se manifestent par des troubles de coagulation, par le syndrome du bébé secoué et par des tumeurs cérébrales ou l’hypertension artérielle», détaille l’experte. Elle renchérit que chez les enfants ayant plus de 10 ans, les causes des AVC sont similaires à ceux des adultes 

Une maladie lourde et invalidante

Les symptômes des attaques cérébrales et leurs séquelles sont handicapants. « L’AVC qui s’est déclenché chez mon enfant à 9 mois lui laisse aujourd’hui des séquelles à 12 ans. Il ne voit plus, il ne parle pas. Pour se déplacer, il a besoin d’attraper des objets », décrit dame Fofana Z , l’air affectée. Elle ajoute que l’enfant était inscrit dans une école spécialisée à Anyama qui coûte 700.000 FCFA l’année. Mais il ne s’y rend plus, pour des raisons financières et faute de moyen de locomotion. 

La fille de 6 ans de Bléa C. a des résultats encourageants, depuis qu’elle est sous un traitement médicamenteux. Les crises d’épilepsie commencent à se raréfier en trois mois de prise en charge. Pour ce qui est de l’enfant de Koulaï D., son état s’est aggravé. « Il a aujourd’hui l’hémiplégie et il a perdu l’usage du langage. Le diagnostic est affolant car l’AVC ischémique a atteint une partie du cerveau. Mon fils est définitivement condamné », se lamente la mère désespérée. Les parents d’enfants malades font un plaidoyer: que l’Etat allège le coût des traitements.  « Je dépense environ 300.000 FCFA, par mois, relève dame Koulaï, qui dénonce le coût du scanner atteignant 150. 000 FCFA et de l’ IRM 230.000 FCFA, dans le privé».

Les quatre règles d’or

Pr. Doumbia-Ouattara prescrit quatre règles d’or pour prévenir les AVC. La praticienne engage les parents à assurer un bon suivi des grossesses et des accouchements. Elle les exhorte à faire un dépistage précoce et suivi de la drépanocytose. Elle leur recommande vivement de respecter le calendrier vaccinal  et elle met un accent particulier sur la consultation devant tout signe neurologique, même s’il régresse rapidement.

Selon la Société Ivoirienne de Neurologie (SIN), on a dénombré 63 jeunes patients reçus en consultation de 2022 à 2023, en Côte d’Ivoire, pour des cas d’affections neurologiques, y compris les AVC. En dépit d’une absence de données sur le taux de guérison des enfants malades en Côte d’Ivoire, l’augmentation du nombre de neuropédiatres, ces dernières années, sonne comme une note d’espoir.


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