30 C
Abidjan
samedi 22 mars 2025
AccueilSociétéHôpitaux et cliniques d’Abidjan: Où vont les déchets médicaux

Hôpitaux et cliniques d’Abidjan: Où vont les déchets médicaux

La rumeur de la découverte de nouveau-nés et de déchets anatomiques, à Akouedo, un quartier d’Abidjan, s’était emparée des réseaux sociaux, en novembre 2024. Trois mois plus tard, la question du traitement des déchets médicaux dans la capitale économique est toujours d’actualité.

« On nous avait accusés pour rien ! », s’est défendu Dr Guillaume Kouadio, Directeur général du Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Treichville. Le premier responsable de cet établissement sanitaire répondait aux rumeurs faisant état de l’implication des CHU de Treichville et de Yopougon dans ce dépôt sauvage de déchets médicaux à la décharge d’Akouedo, fermée depuis 2019. Dr Kouadio explique que les bulletins de santé portant les mentions « CHU de Treichville »  retrouvés sur les lieux étaient plutôt produits dans un laboratoire externe. « Au niveau du CHU de Treichville, nous disposons d’un banaliseur, un équipement qui broie et stérilise les déchets médicaux et d’un incinérateur qui brûle les déchets médicaux», détaille-t-il, lors d’un entretien qu’il a accordé à Le Tamtam Parleur, le 6 février 2025, à ses bureaux. 

Du côté du CHU de Cocody, nos démarches sont restées vaines. Dans la commune de Koumassi, M. Koné Vakaba, gestionnaire de la clinique médicale Les Grâces Plus avance qu’il a confié le traitement des déchets médicaux à l’entreprise privée EADI, située à Yopougon.

Le kilo de déchet anatomique à 13.000 F

« J’ai pris la peine d’aller vérifier les conditions de traitement des déchets médicaux dans cette entreprise, avant de passer un contrat mensuel qui me coûte cher. Certains mois, je paye jusqu’à 700.000f, les frais d’enlèvement et de traitement », relève Koné Vakaba de la clinique Les Grâces Plus. Aussi plaide-t-il pour que l’État accorde des facilités aux cliniques privées en vue de faire traiter leurs déchets à des coûts préférentiels, dans des structures de gestion publique de déchets médicaux. 

En général, les entreprises privées qui traitent avec les cliniques privées facturent le kilogramme de déchets coupants, tranchants ou piquants comme les scalpels, seringues, lames ou perfuseurs à 3000f, selon des informations recueillies auprès de l’employé d’une entreprise de gestion des déchets. Pour ce qui est des déchets anatomiques produits lors des accouchements et des opérations, les entreprises de traitement de déchets médicaux négocient leur collecte à 10.000 voire 13.000F.CFA le kilogramme. Notre informateur ayant requis l’anonymat ajoute que certains malades opérés et des femmes ayant accouché préfèrent prendre les restes de leurs organes pour les « enterrer » chez eux. Ces opérations d’enfouissement illégales de déchets médicaux constituent un gros manque à gagner pour les entreprises de traitement de déchets, regrette-t-il. 

À la clinique Sainte Famille, Dr M’Bengué, qui est le médecin résident, n’a pas été à mesure de nous expliquer comment sont traités les déchets médicaux issus des  soins, au sein de cet établissement. Ce fut le cas à la clinique  El Jireh, à Koumassi Prodomo, dont le médecin trouvé sur les lieux, le vendredi 14 février 2024, soutient que cette structure sanitaire ne produit que peu de déchets médicaux, car ils dispensent, exclusivement, des soins infirmiers. Les inscriptions sur la façade avant de cette clinique indiquent pourtant qu’elle abrite un laboratoire et propose plusieurs spécialités médicales. 

Pour ce qui concerne la clinique Irys, à quelques encablures de là, la jeune dame à l’accueil a opposé un refus à notre demande d’avoir le contact des responsables absents. Nous avons éprouvé le même mal à rencontrer les responsables de cette clinique où il n’y a aucun incinérateur visible, lors d’une enquête précédente sur la traque aux cliniques illégales en Côte d’Ivoire. Interrogé sur l’opacité qui règne sur la question du traitement des déchets médicaux, le directeur de Brigade sanitaire n’a pas caché son agacement. 

« Dans les dossiers demandés par la Depps (Ndlr: Direction des établissements privés et professions sanitaires) la clinique doit produire un contrat qui la lie à une entreprise chargée de l’enlèvement et du traitement des déchets médicaux, avant d’être autorisée à exercer», fait observer le directeur de ladite brigade, Dr Mermoz Bozou.

La Brigade sanitaire menace

 « Lorsque les agents de la Brigade sanitaire arrivent dans un établissement sanitaire privé, la non existence dudit contrat est un motif de fermeture», assure-t-il.

 La revue internationale des sciences de gestion a publié, en octobre 2021, qu’un code de l’environnement ivoirien a posé les jalons d’un cadre réglementaire de la gestion des déchets médicaux, dès 1996. L’arrêté 131 MSHP/CAB/DGHP/DRHP du 03 juin 2009 relatif à la gestion des déchets médicaux a fixé les clous des modalités d’autorisation et du mode de traitement et d’élimination de ces déchets. 

Les fumées toxiques de l’incinérateur

Néanmoins, La revue internationale de sciences de gestion regrette que « le cadre institutionnel (ne soit pas) contraignant ».

Dans le quartier de Koumassi Aklomiabla, dame Lou est une riveraine de l’hôpital confessionnel privé de L’enfant Jésus. « Les fumées produites les soirs, lorsque l’incinérateur est allumé sont très piquantes. Elles donnent des maux de tête. Mes enfants ont du mal à supporter cela. Même lorsqu’on ferme les fenêtres, ça pénètre dans les maisons. », peste-t-elle. Cette plainte est partagée par des voisins qui ont leurs habitudes devant l’établissement préscolaire mitoyen, où l’ombrage d’un grand arbre leur sert d’abri. Ils redoutent que le dioxyde de carbone (CO2) et les émanations des polluants n’affectent leur santé et l’environnement.

Selon le Programme national de gestion des déchets médicaux (PNGD), de 2009 à 2016, la production de déchets médicaux est passée de 13,2 tonnes à 25,55 tonnes par jour en Côte d’Ivoire.


Articles Similaires
spot_img

Articles Populaires

commentaires recents