La BICICI est passée depuis fin septembre 2022 dans le giron de l’Etat ivoirien. Le consortium formé par la BNI, la CNPS, la CGRAE et la CDC détient plus de 67% des parts de cette banque.
Le marathon du rachat de la Banque internationale pour le Commerce et l’Industrie de la Côte d’Ivoire (BICICI) a pris fin le mercredi 28 septembre 2022 par la signature d’un décret par le chef de l’Etat Alassane Ouattara, autorisant l’Etat à prendre une participation majoritaire dans la banque. Deux jours plus tard, sur les bords de la Seine, le dernier épisode se jouait. Le consortium ivoirien composé de la Banque Nationale d’Investissements (BNI), de la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale (CNPS), de la Caisse Générale de Retraite des Fonctionnaires et Agents de l’Etat (CGRAE) et de la Caisse des Dépôts et Consignations de Côte d’Ivoire (CDC-CI) signait, pour le compte de l’Etat, les actes d’acquisition des participations de BNP (Banque Nationale de Paris) Paribas et Proparco (Société de Promotion et de participation pour la coopération économique), le bras financier de l’Agence française de développement (AFD) dédié au secteur privé. Ces deux entités – BNP Paribas et Proparco – cédaient, respectivement 59,79% et 7,70% du capital de la BICICI au quatuor ivoirien qui détient ainsi 67,49 du capital de la banque.
Accompagner l’économie
Pour Abidjan, reprendre la BICICI est un acte fort qui permettra d’accompagner plus efficacement les acteurs économiques opérant tant sur le plan local qu’international. Cette prise de participation vise non seulement à maintenir la BICICI au service du développement économique de la Côte d’Ivoire, mais également à accroître les capacités financières des membres du consortium – BNI, CNPS, CGRAE, CDC – afin de leur permettre d’accompagner au mieux le développement et la croissance des acteurs économiques. A travers cette transaction, l’objectif prioritaire du Consortium est d’accompagner et de renforcer la BICICI, acteur historique du financement de l’économie ivoirienne, dans une nouvelle phase de son développement. Le Consortium constitué d’investisseurs institutionnels solides, disposant de ressources longues, apportera à la BICICI l’appui et l’accompagnement nécessaires pour lui permettre d’accélérer son développement tout en maintenant l’excellente qualité de service fournie à ses clients depuis plusieurs décennies.
Selon plusieurs sources, il semblerait que les autorités ivoiriennes ont écouté l’expert en banque, consultant international et ancien ministre de l’Economie et des Finances du Sénégal qui appelait les Etats de la Côte d’Ivoire et du Sénégal à ne pas observer de façon neutre le désengagement de BNP PARIBAS. Amadou Kane l’ancien administrateur directeur général de la BICIS disait à ce sujet, que « les Etats concernés devront sérieusement s’intéresser de très près au processus de sortie de BNP PARIBAS ». Une sortie qui, de son point de vue, offrait à la Côte d’Ivoire et au Sénégal l’opportunité historique de constituer par des rapprochements appropriés avec d’autres entités locales dans chacun de ces deux Etats, un pôle financier national puissant ».
Coût de l’opération
En Côte d’Ivoire, la BNI, la CNPS, la CGRAE et la CDC vont débourser 80 milliards FCFA (125,3 millions $) pour racheter 11,25 millions d’actions, soit 7 110 FCFA le titre. Huitième actif (total bilan) du secteur bancaire ivoirien et 16edans l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), la BICICI détient 5% des actifs du secteur bancaire ivoirien, 5% des parts de marché en matière de dépôts et presque autant pour les encours de crédits, selon les calculs effectués par l’Agence Ecofin, qui s’est basée sur les données de l’année 2021. L’an dernier, son résultat net a atteint 9,6 milliards FCFA, alors que son chiffre d’affaires (PNB) chutait légèrement à 44,167 milliards FCFA. La sortie du groupe français de la BICICI est le dernier d’une série de désengagements de la Banque nationale de Paris des marchés ouest-africains, après le Burkina Faso, le Mali, la Guinée et, plus récemment, le Sénégal. La désormais ex-filiale de BNP Paribas occupe le 16erang des établissements de crédits dans la zone UEMOA, avec 848,4 milliards de FCFA (1,29 milliard d’euros) d’actifs à la fin 2021. Tandis que le quatuor d’établissements financiers publics ivoiriens repreneur de la BICICI est mené par la Banque nationale d’investissement (BNI). Cette dernière se classe à l’heure actuelle au 9erang dans la sous-région, avec un bilan de 1.216,6 milliards de F CFA. Elle est devancée au niveau régional par la Banque malienne de solidarité (BMS, 8e, avec 138 milliards de F CFA au bilan).
Qui sont les membres du Consortium
La Banque Nationale d’Investissement
La BNI assure la triple fonction de banque d’investissement, de refinancement et de conseil. Elle se classe au 5erang et figure parmi les meilleures banques en Côte d’Ivoire sur un marché fortement concurrentiel composé de 29 banques. Ses principales missions sont le financement des PME, l’accessibilité bancaire et la financiarisation de l’économie et l’accompagnement de l’Etat sur les problématiques financières. Forte de ses 50 agences réparties sur l’ensemble du territoire national et plus de 150 GAB de dernière génération et espaces digitaux, la banque vise à être toujours plus proche de sa clientèle et à rendre un service de qualité en toute sécurité.
La Caisse Nationale de Prévoyance Sociale
LaCNPS a pour objet la gestion des régimes obligatoires de prévoyance sociale des travailleurs du secteur privé et assimilés d’une part et des travailleurs indépendants d’autre part. Dans ce sens, elle a pour mission: le recouvrement des cotisations sociales ; le paiement des prestationsafférentes aux différents régimes ; la gestion des régimes complémentaires ou spéciaux, obligatoires ou volontaires. Depuis plusieurs années, laCNPS affiche des ambitions d’optimisation de l’allocation de ses réserves avec notamment les prises de participations dans plusieurs entités ivoiriennes ou opérant en Côte d’Ivoire
La Caisse Générale de Retraite des Fonctionnaires et Agents de l’Etat
Créée en 1962, la CGRAE est devenue en 2012 avec la réforme, une Institution de Prévoyance Sociale (IPS) qui a pour objet la gestion, au profit des bénéficiaires : des régimes obligatoires de pension, des régimes complémentaires ou spéciaux, obligatoires ou volontairesde pension, le recouvrement des cotisations et la gestion des fonds collectés au titre des différents régimes. L’institution entend optimiser ses capacités financières et se positionne comme un investisseur de référence dans l’économie ivoirienne. La CGRAE vise à diversifier ses placements pour capter plus de rendement au bénéfice de ses adhérents. L’un des axes de déploiement des réserves est la prise departicipation dans des institutions financières rentables qui présentent des taux de retours sur investissements stables.
La Caisse des Dépôts et Consignations
Créée par la loi n° 2018-574 du 13 Juin 2018, la CDC-CI est un établissement public, doté de la personnalité morale et de l’autonomie financière. Elle est placée sous la tutelle du ministre de l’Economie et des Finances et bénéficie de la garantie de l’Etat. Elle a pour missions la mobilisation et la gestion sécurisée de fonds publics et privés et d’agir en tant qu’investisseur institutionnel et plus particulièrement en tant que : investisseur d’intérêt général, investisseur financier par la gestion de portefeuille diversifié dans une optique de rentabilisation de ses placements ; gestionnaire pour compte de tiers (gestion de fonds de retraite, fonds de prévoyance et de capitalisation). La CDC-CI investit une part importante de ses ressources dans des projets au service du développement économique de la Côte d’Ivoire.
M’Bah Aboubakar