A l’été 2022, l’Association sportive d’Argy s’apprêtait à mettre la clé sous la porte. Jusqu’à ce qu’une quinzaine d’exilés issus de sept nationalités vienne y signer une licence, remettant à flots l’équipe de football.
Peu s’en est fallu que l’Association sportive centenaire d’Argy, commune située dans le département de l’Indre, disparaisse, à l’été 2022. L’année dernière, la formation centenaire ne comptait plus que six licenciés et a failli mettre la clé sous le paillasson. Le départ de plusieurs joueurs et l’impossibilité d’en trouver de nouveaux la condamnaient à mort. Jusqu’à ce qu’un « miracle » survienne : une quinzaine de migrants, de demandeurs d’asile issus d’Afrique subsaharienne pour la majorité – des Gambiens, Maliens, Guinéens, Ivoiriens, Colombiens – sont venus d’eux-mêmes signer une licence au démarrage de la saison. Huit mois plus tard, la chronique d’une mort annoncée s’est transformée en hymne à la fraternité.
« Notre situation à Argy, c’est que ce club, qui a 102 ans cette année, allait devoir fermer dans l’inquiétude de ses dirigeants car il n’y avait pas assez de joueurs. Et grâce aux migrants qui sont installés à Buzançais, à Châteauroux, un d’entre eux a proposé de venir avec des collègues intéressés par le football. Et à Argy, sept nationalités s’entraînent avec les bénévoles d’Argy, oui, c’est très beau », explique Bernadette Villemont, maire d’Argy. « Tous ces footballeurs jouaient les uns avec les autres au City Parc ou sur des terrains ici et là, et ce n’était que temporaire. Et ils voulaient avoir une équipe pour vraiment s’améliorer au football, pour aller plus haut », raconte Jean-Marie Biaunier, président du club Argy. « Nous étions une équipe sans joueurs et eux étaient des joueurs qui cherchaient une équipe. Donc ça a marché tout de suite et il n’y avait aucune raison pour que ça ne marche pas », ajoute-t-il. Et ça marche plutôt bien puisque quelques mois plus tard, le club cosmopolite évolue à la troisième place de son championnat.
Ally, qui n’a pas souhaité donner son nom complet, a 19 ans et vient de Côte d’Ivoire. « On est contents d’avoir permis de sauver le club. Ça nous motive pour travailler plus. L’ambition c’est de monter bientôt en troisième division », assure le jeune homme, qui vient de trouver un emploi dans l’industrie textile. « ‘Tout d’abord, quand nous sommes arrivés à Argy, nous n’avons pas eu de difficultés à nous intégrer, à communiquer avec les joueurs qui étaient déjà là, dans le jeu. Beaucoup étaient partis. Mais avec ceux qui sont là, c’était vraiment sympa. Résultat, on s’entendait bien et maintenant on communique, on s’amuse, c’est comme une petite famille », explique Telly, apprenti soudeur et chaudronnier, de Guinée Conakry.
Pour ces migrants, l’intégration passera sans nul doute aussi par le ballon rond.
Ibrahima KHALIL