Le scrutin présidentiel en Côte d’Ivoire, prescrit par l’article 56 de la Constitution
ivoirienne, est l’aboutissement d’un long processus qui dure plus d’une dizaine de mois et qui est soumis à des étapes techniques. Et ce, avec un organisateur en chef dénommé Commission électorale indépendante (CEI), pour un budget de 54 milliards FCFA tel qu’inscrit dans la loi de finances 2025.
La première étape de ce processus électoral, c’est le recensement dont l’objectif est d’actualiser la liste électorale, de répertorier les nouveaux électeurs, notamment les jeunes ayant atteint l’âge de 18 ans ; de radier les électeurs décédés et ceux qui ont perdu leurs droits civiques en raison d’une condamnation ou d’une perte de nationalité. Pour réussir cette première étape, la Commission électorale indépendante se sert de kits biométriques composés d’ordinateurs portables, de caméras numériques, de scanners d’empreintes digitales et d’imprimantes. Selon la CEI, ces équipements permettent de collecter et d’enregistrer les données personnelles et biométriques (photo, empreintes digitales, signature) des électeurs. Les informations sont stockées dans une base de données centrale sécurisée, afin de mettre à jour la liste électorale. Ce système est appelé système biométrique d’enrôlement. Il permet d’éviter les doublons, de fiabiliser la liste électorale, de faciliter l’identification des électeurs le jour du scrutin. Pour l’élection présidentielle d’octobre 2025, ce sont 12 000 centres d’enrôlement qui ont été ouverts sur l’étendue du territoire national pour une opération qui s’est déroulée du 19 octobre au 17 novembre 2024. Selon le président du comité de coordination de l’opération de révision de la liste électorale, Bamba S. Siaka, 4e vice-président à la CEI, le système biométrique a permis à 517 924 personnes figurant sur la liste électorale de demander un changement de lieux de vote ou de modifications de données personnelles. Quant aux nouveaux majeurs, ils ont été dénombrés à 943 157. Le tout pour un total de 1 461 081 requérants. Le recensement aboutit à la publication d’une liste provisoire qui deviendra, plus tard… définitive !
De la liste provisoire à la liste définitive !
Après le recensement, la CEI met en branle la machine de la centralisation des données biométriques et personnelles. Selon un expert en informatique, toutes les informations collectées (noms, dates et lieux de naissance, empreintes digitales, photos, signatures, pièces justificatives) sont transmises à la base de données centrale de la CEI. Ces données sont gérées dans un système informatique sécurisé. Ces informations passent par un logiciel de déduplication biométrique qui compare les empreintes digitales et les photos pour détecter les doublons. Le nettoyage de la base électorale se termine avec la radiation des personnes décédées signalées par l’état civil, le retrait des électeurs qui ont perdu leurs droits civiques (condamnations, cas de fraude) et la prise en compte des changements de lieux de vote et des modifications de données personnelles. Après ce tri, une liste électorale provisoire est publiée pour permettre aux citoyens de vérifier leurs informations. Chaque électeur peut alors introduire une réclamation en cas d’erreur ou d’omission au regard de l’article 12 du Code électoral. La période de réclamation est suivie de la publication de la liste électorale définitive. Pour le scrutin du 25 octobre 2025, 8,7 millions d’électeurs iront aux urnes. Mais avant, les candidats doivent chercher des parrains.

Le président de la CEI, Coulibaly-Kuibiert, a toujours réaffirmé l’engagement de
l’institution pour un processus électoral crédible./Ph-Dr
Le parrainage, l’autre étape cruciale du scrutin
Depuis 2020, les candidats à l’élection présidentielle sont tenus de récolter le soutien d’au moins 1 % des électeurs locaux dans au moins 50 % des régions et/ou districts d’Abidjan et de Yamoussoukro. C’est-à-dire que le candidat à la présidentielle a le choix entre 15 régions et les deux districts autonomes d’Abidjan et de Yamoussoukro, 16 régions et l’un des deux districts autonomes d’Abidjan et de Yamoussoukro, 17 régions sans les deux districts autonomes d’Abidjan et de Yamoussoukro. Pour réussir cette opération, la CEI met à la disposition de tous les candidats des kits biométriques, contenant chacun un terminal mobile, pour la collecte biométrique des parrainages de la personne désireuse d’être candidate ou à son représentant mandaté par elle, et remet sur clé USB le modèle de registre papier de collecte de parrainages. Les formations politiques ont près de deux mois pour réunir leurs parrainages. Cette étape fastidieuse exige la plus grande attention, surtout que, conformément à la décision N° CI-2020-008/28-07/CC/SG du 28 juillet 2020 portant mise en place du dispositif de vérification des parrainages des candidats à l’élection présidentielle, un comité technique d’appui (CTA) au Conseil constitutionnel a été mis en place afin de procéder à la vérification des parrainages avant de transmettre les résultats au président du Conseil constitutionnel conformément à l’article 10 de cette décision.
Selon la CEI, le parrainage électoral est une caution donnée ou accordée par des élus ou par des citoyens à une personne, afin de lui permettre d’être candidate à une élection. Cette caution est matérialisée par une signature.
25 juillet-26 août : dépôt des candidatures
Les candidats à la candidature ont un mois pour déposer leur dossier auprès de la CEI. Parmi les documents exigés : une déclaration personnelle de candidature signée, le reçu de cautionnement de 50 millions, la liste des parrainages citoyens, un certificat de nationalité, une attestation fiscale et un extrait de casier judiciaire vierge. Les dossiers sont ensuite transmis au Conseil constitutionnel, qui en examine la conformité avant de publier la liste définitive des candidats autorisés à concourir. Faut-il le rappeler, pour cette élection présidentielle, cinq candidatures ont été retenues sur soixante demandes. Plus de 80 % des candidatures rejetées sont le fait de parrainages non conformes aux dispositions prescrites par le Code électoral. Prochaine étape, la campagne électorale.

Les acteurs politiques jouent un rôle crucial dans le processus électoral./Ph-Dr
Mi-octobre : campagne électorale
Du 10 au 23 octobre, la campagne électorale s’ouvre. Les dates d’ouverture et de clôture de la campagne sont fixées par décret pris en Conseil des ministres, sur proposition de la CEI. Ce point culminant de la compétition doit permettre aux candidats de présenter leurs programmes et de mobiliser leurs électeurs. L’article 30 de l’ordonnance N°2020-356 portant Nouveau code électoral prescrit que pendant la campagne, les candidats ont un égal accès aux organes officiels de presse ainsi qu’aux médias du secteur public de la communication audiovisuelle garantis par les autorités en charge de la régularisation de la presse et de l’audiovisuel. C’est également durant cette période que le matériel de vote est déployé dans les bureaux à travers le pays, généralement lors des derniers jours de campagne, afin d’éviter les risques de sabotage.
L’élection et la proclamation des résultats
Samedi 25 octobre 2025, jour de vote. Les électeurs sont appelés à se rendre dans les bureaux de vote avec leur carte d’identité et d’électeur. Chaque électeur y reçoit un bulletin de vote unique sur lequel figurent tous les candidats, marque son choix dans l’isoloir, plie le bulletin et le place dans l’urne. Le dépouillement commence immédiatement après la fermeture des bureaux de vote et les résultats officiels sont habituellement annoncés dans un délai de dix jours après le scrutin. La CEI a trois jours pour transmettre les résultats au Conseil constitutionnel, qui a une semaine pour valider et proclamer les résultats officiels.
La Constitution ivoirienne prévoit que l’élection du président de la République est acquise à la majorité absolue des suffrages exprimés soit 51%. Si cette majorité n’est pas atteinte au premier tour, un second tour est organisé entre les deux candidats ayant obtenu le plus de suffrages. Celui-ci devrait alors être organisé le dernier samedi du mois de novembre, soit environ un mois après le premier tour.