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jeudi 19 septembre 2024
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Production / Commercialisation : Comprendre la traçabilité du cacao

Les autorités ivoiriennes ont lancé un programme de traçabilité du cacao, dont l’objectif est d’assurer une cacaoculture durable et de satisfaire aux exigences environnementales internationales.

Dans l’optique de répondre aux exigences contemporaines du marché mondial du cacao, notamment en matière de lutte contre la déforestation et l’utilisation des enfants dans la cacaoculture, la Côte d’Ivoire a décidé de doter la filière café-cacao d’un système national de traçabilité des flux physiques et financiers. Les objectifs visés dans la mise en place du système national de traçabilité sont clairs. Il s’agit de la maîtrise de l’origine et du circuit de la fève (flux physique), de la lutte contre la déforestation par ségrégation des produits, selon l’espace de production, du paiement effectif du prix garanti bord champ aux producteurs (flux financiers).

Pour la mise en œuvre de ce programme, la structure nationale en charge de l’exécuter – le Conseil de Régulation, de Stabilisation et de Développement de la Filière Café-Cacao, appelé encore Conseil du Café-Cacao (CCC) – a identifié trois phases principales, notamment le recensement des producteurs et de leurs vergers, la production et la distribution des cartes des producteurs et le développement et le déploiement de la plateforme informatique d’enregistrement des flux physiques et financiers.

Le recensement des producteurs de café-cacao et de leurs vergers

Cette opération s’est soldée par l’identification de 993.031 producteurs et la géolocalisation de 3.220.800 hectares de café et de cacao dont 2.522.170 hectares pour le cacao, 110.470 pour le café et 588.160 hectares pour le café-cacao en cultures associées. Pour l’actualisation de la base de données des producteurs, le Conseil du Café-Cacao a installé dans chaque délégation régionale une équipe d’agents cartographes. Afin d’actualiser les données et de garantir leurs pertinences pour la filière, un dispositif permanent de cartographie des parcelles et d’identification des producteurs de café-cacao a été mis en place dans les délégations régionales du Conseil du Café-Cacao. Un dispositif qui, selon le ministre de l’Agriculture et du Développement rural, Kobénan Kouassi Adjoumani, continue d’identifier les producteurs non encore recensés et de prendre en compte les réclamations.

La production et la distribution des cartes des producteurs

Sur la base des résultats du recensement des producteurs, le Conseil du Café-Cacao s’est engagé à offrir aux producteurs une carte multifonction dotée de deux technologies : un code QR renfermant toutes les informations sur le producteur et son verger, une puce bancaire pour permettre des transactions financières sur la commercialisation des produits (vérification du respect des prix garantis et sécurisation du revenu des producteurs).

La carte de producteur servira de carte professionnelle aux producteurs de café et de cacao, de portefeuille électronique, de support des transactions commerciales et de moyen de sécurisation du revenu des producteurs. La distribution des cartes aux producteurs se fera jusqu’au 31 mars 2023 dans les zones de production du café et du cacao.

Développement de la plateforme informatique de traçabilité

La carte du producteur sera utilisée dans un système de gestion informatique pour garantir la fiabilité dans l’enregistrement des flux physiques et financiers tout au long de la chaine valeur du café et du cacao. Ce système aura plusieurs caractéristiques, à savoir l’identification de tous les acteurs de la chaîne valeur à travers un matricule unique, la dématérialisation des supports de commercialisation telle que le reçu d’achat, la digitalisation des paiements des producteurs et le contrôle automatique du potentiel de commercialisation du producteur en corrélation avec ses parcelles géolocalisées. Il faut ajouter à ces caractéristiques, le marquage des sacs de chaque producteur à travers un identifiant unique pour un meilleur suivi du parcours de la fève tout au long de la chaine des valeurs et la ségrégation des volumes commercialisés selon le milieu de production (forêts classées, domaine rural non protégé). Pour le ministre Kobénan Kouassi Adjoumani, la mise en exploitation du système national de traçabilité, dès la campagne principale 2023/2024, réglera définitivement la question de la lutte contre la déforestation et facilitera, en sus, la mise en œuvre des mesures correctives dans la lutte contre le travail des enfants.

Cette carte est une nouvelle étape dans le programme de traçabilité du cacao ivoirien. L’objectif c’est de pouvoir suivre le parcours d’une fève de l’arbre au bateau pour à terme, pouvoir éliminer le travail des enfants et la déforestation de la chaine de productions, comme le réclament de plus en plus les marchés américains et européens. « Nous avons élaboré ce qu’on appelle la carte du producteur. C’est une carte multifonctions sur lesquelles il y a un QR code qui génère les informations sur le producteur et son verger, et il y a également une puce bancaire visa qui permet au producteur de faire ses opérations commerciales. Nous voulons tracer le produit, savoir exactement quel cacao vient de telle plantation, vient de telle région. L’objectif c’est de connaître qui produit quoi, ça transite par qui avant d’arriver à l’exportation, pour que nous puissions rassurer le consommateur final que notre cacao est produit dans des conditions éthiques », a expliqué Jérémie Kouassi, directeur chargé du développement agricole au Conseil Café Cacao, lors de la dernière édition des Journées Nationales du Cacao et du Chocolat (JNCC). « En Côte d’Ivoire, tout le cacao produit sera traçable depuis le champ de l’exploitant jusqu’à l’usine des exportateurs, dès la saison 2023-2024 », a confirmé le Directeur général du Conseil Café-Cacao, Yves Brahima Koné, dans une note d’information adressée aux médias, à quelques jours  de l’ouverture de la campagne 2022-2023.

Respect des engagements internationaux

Aujourd’hui, la Côte d’Ivoire produit plus de 2,2 millions de tonnes de fèves de cacao, soit environ 44% de la production mondiale. Ce secteur représente environ 14% du Produit Intérieur Brut (PIB), 40 % du PIB agricole, 40 % des exportations du pays, et assure, directement ou indirectement, les ressources de subsistance à près de six millions de personnes sur le territoire national.

La filière cacao fait face aujourd’hui à de multiples défis : la qualité, la productivité, la valorisation du travail des planteurs, la professionnalisation des acteurs ou le respect de l’environnement. La mise en œuvre de ce programme de traçabilité s’inscrit dans un contexte de pressions de plus en plus fortes pour une cacaoculture durable mettant fin à la déforestation et au travail des enfants formulées par des organisations environnementales internationales et particulièrement par l’Union européenne (UE), le premier marché du cacao pour la Côte d’Ivoire. L’un des plus grands défis de la filière reste la transformation locale pour accroître la valeur ajoutée du cacao. La Côte d’Ivoire ne reçoit que 5% à 7% des gains générés par cette filière, selon la Banque mondiale, alors que le marché représente environ 130 milliards de dollars par an, en termes de recettes. L’enjeu est donc d’accroître le taux de transformation, qui tourne actuellement autour de 35%.

Lors de la campagne 2020-2021, la Côte d’Ivoire a produit deux millions de tonnes de fèves de cacao, soit 40% de l’offre mondiale. En Côte d’Ivoire, pays comptant 29 millions d’habitants, la filière fait vivre environ six millions de personnes grâce à quelque 800.000 chefs d’exploitation et l’économie cacaoyère fournit 40% des recettes d’exportation du pays.

M’Bah Aboubakar

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