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mercredi 11 septembre 2024
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Filière Coton/La prochaine récolte menacée

Si rien n’est fait, avec diligence, la récolte de la prochaine saison cotonnière risque d’être catastrophique. Une maladie transmise par les jassides, des insectes piqueurs suceurs, menace les plants de coton, depuis mi-juin.

Un insecte ravageur pourrait affecter la production de coton en Côte d’Ivoire cette année. Les pertes sont estimées entre 30 et 40%, à en croire le Directeur général du Conseil Coton Anacarde (CCC, l’organe étatique de gestion de la filière), Adama Coulibaly qui répondait à nos confrères de Reuters. Le ravageur  affecte les cultures de coton en Côte d’Ivoire depuis plusieurs années. Mais c’est la première fois que les jassides sont un tel impact sur la culture, à en croire Adama Coulibaly. En juillet dernier, les cultures de coton dans le Nord du pays ont commencé à se détériorer à cause des ravages de cet insecte « De nombreux producteurs sont dans le désarroi. Nous n’avons pas encore de chiffres mais nous estimons les pertes entre 30 et 40 % cette année », a-t-il déclaré.

Une production de 570 425 tonnes de coton était attendue cette année

Pour la saison 2022-2023, qui a débuté en mai dernier, la production de coton devrait atteindre les 570.425 tonnes. La saison dernière, la Côte d’Ivoire a produit 539.623 tonnes. Sur le terrain, les régions productrices de coton sont confrontées, depuis, à des attaques importantes de jassides (ou cicadelles), limitant de fait les efforts des producteurs et menaçant les objectifs de production du pays.

Le vendredi 30 septembre, les producteurs de coton de Tortiya et de Niakara, dans le Nord du pays, ont déploré la présence de cette maladie destructrice des cotonniers. « Les feuilles du cotonnier jaunissent et commencent à tomber avec les capsules de la plante. Cela anéantit les efforts et les espoirs du paysan et nous laisse sans voix », a expliqué le président de la Société coopérative (Scoop) « Lôh-Kpô » de Tortiya, Amara Diarrassouba dit Fernando, s’exprimant au nom du groupement de producteurs de coton de la localité. Pour Amara Diarrassouba, cette maladie contre laquelle les paysans sont jusque là impuissants annonce une campagne de commercialisation du coton « difficile » pour les agriculteurs dont les champs ont été décimés par cette « vilaine maladie inconnue qui a franchement pris de l’ampleur cette année 2022 ».

Les propos d’Amara Diarrassouba, 3e adjoint au maire de Tortiya sont appuyés par d’autres de la zone de Niakara et de Tafiré. Dominique Yéo Donikan (41 ans), cotonculteur à Konibatogo plaide auprès du gouvernement afin qu’une solution soit trouvée pour débarrasser les producteurs de cette maladie qui, depuis 2021, « sème l’incertitude, le désespoir et le découragement chez nous les producteurs et menace sérieusement la filière du coton ».

Les producteurs très préoccupés

Selon Silué Kassoum, un acteur de la filière, la production nationale prochaine pourrait connaître une grande perte à cause de cette maladie. « Les jassides sont des insectes qui attaquent les cotonniers. A en croire les chercheurs, les jassides qu’on retrouve chez nous cette année sont ceux qu’on localisait sur le gombo. Ils ont migré sur les cotonniers. Depuis mi-juin, on a eu cette forte attaque de ces insectes. Malgré les produits utilisés pour le traitement, rien n’a changé tant l’attaque était forte », a indiqué à nos confrères de 7 Infos, le Directeur général de la Fédération des Producteurs de Coton de Côte d’Ivoire (FPC-CI) qui s’est dit très préoccupé par la situation.

« Cette attaque fait perdre une très grande proportion de la production nationale. La Côte d’Ivoire a connu une campagne difficile cette année. Déjà la flambée des intrants et une mauvaise répartition de la pluviométrie constituaient  une difficulté pour les producteurs. A cela vient s’ajouter l’attaque des jassides, tout ceux-ci est beaucoup stressant pour la filière », a déploré de son côté  le directeur exécutif de l’Organisation Interprofessionnelle Agricole de la Filière Coton de Côte d’Ivoire, Silué Siontiamma Jean Baptiste.

Face à la menace persistante des jassides, le ministre de l’Agriculture et du Développement rural, Kobénan Kouassi Adjoumani, a effectué le lundi 17 octobre, une mission urgente d’observation et de rencontre avec les producteurs dans le Nord, précisément à Dih, à 5 km de Korhogo, sur l’axe Korhogo-Boundiali.

Pour la campagne cotonnière 2022-2023 ouverte en juillet, le gouvernement ivoirien a débloqué 29 milliards de francs CFA en intrants et pesticides et fixé le prix d’achat du coton à 310 FCFA (0,46 dollar) le kilo pour un objectif de production de plus de 570.425 tonnes. Malgré un recul de la production en 2021-2022 avec 540.000 tonnes de coton graine contre 559.000 tonnes en 2020-2021, la Côte d’Ivoire reste derrière le Benin et le Mali et devant le Burkina Faso, l’un des plus gros producteurs de coton en Afrique. Les jassides, il faut le savoir, sont des insectes qui piquent et sucent les feuilles de cotonnier durant tout le cycle de culture, provoquant un jaunissement des bordures des feuilles et pouvant causer un arrêt du développement des plants.

Représentant environ 7% des recettes d’exportation et contribuant à hauteur de 1.7% au Produit Intérieur Brut (PIB), la filière coton joue un rôle important dans l’économie et l’équilibre social de la Côte d’Ivoire qui figure parmi les principaux producteurs de cette spéculation en Afrique.

Faire front contre les jassides

Le front contre l’insecte ravageur est conduit par le ministre de l’Agriculture et du Développement rural, Kobénan Kouassi Adjoumani, en liaison avec le Conseil du coton et de l’anacarde (CCA) et l’Organisation Interprofessionnelle Agricole de la filière coton de Côte d’Ivoire (Intercoton). Les chercheurs du Centre national de recherche agronomique (CNRA) ont ainsi été mobilisés à l’effet de venir à bout de l’insecte. Dans cette veine, des équipes ont sillonné, 26 au 30 septembre, à l’effet de rassurer les producteurs. Même si, en raison de l’ampleur de l’attaque, la prochaine récolte sera en deçà des productions, les experts du CNRA ont appelé les producteurs à continuer le traitement de leurs champs pour réduire le nombre des jassides. Ajoutant que les nouveaux produits qu’ils ont mis au point prouveront leur pleine efficacité lors de la campagne 2023-2024. Le directeur exécutif de l’Intercoton a exhorté producteurs et autres acteurs de la filière à faire confiance au CNRA et à s’approprier les solutions édictées pour au moins sauver la prochaine traite.

Avec les producteurs, les échanges ont porté essentiellement, sur l’efficacité des produits issus de la recherche, la disponibilité de ces produits et la manière de les utiliser pour circonscrire l’action de l’ennemi. Les émissaires du ministre Kobénan Kouassi Adjoumani ont surtout eu à cœur de convaincre les contonculteurs à ne pas abandonner la culture de coton, l’un des produits phares qui assurent des entrées de devises pour le pays, classé 3e africain au niveau de la production. « La culture du coton contribue à 7% du PIB », selon le représentant du ministère de l’Agriculture et du Développement rural. Cesser sa culture serait donc un important manque à gagner pour l’économie ivoirienne », a-t-il indiqué.

M’Bah Aboubakar

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