Le jeudi 20 juin 2024, un cancer en phase terminale avait eu raison de Sibiry Kouamé Lazare alias Alan Bill de Souza dans un hôpital de Versailles, à Paris. L’un des pionniers du zouglou venait ainsi de ranger son micro. Artiste chanteur Alan Bill était surtout un percussionniste né!
Né en 1965, c’est dans le quartier de Yopougon Sogefiha Solic 1 qu’Alan Bill grandit, avant de révéler très tôt son talent de percussionniste. Dans les années 1978-1979, les sons que laissaient échapper les doigtés d’Alan Bill au contact du tam-tam forçaient l’admiration. Et quand des groupes de ballets devaient réaliser des chorégraphies, on ne cherchait plus midi à 14 heures. Alan Bill était le premier choix. Son talent le propulse au-devant du premier groupe d’animation du quartier dénommé Le Gabi Show. Il avait à ses côtés Débolo Deni Pacôme, Assié, Diguê Bams, Kadhafi, Zahui Lopèz, Gaoussou Dosso, Bohui Nicaise… Ces noms appartiennent à la génération qui a entretenu « l’ambiance facile », appelée aujourd’hui le wôyô, qui, de toute évidence, est l’ancêtre du zouglou.
À l’appel du drapeau ivoirien
En 1983, les prouesses de ce groupe d’animation auquel appartient Alan Bill sont reconnues par la Fédération ivoirienne de football. Les membres du Gabi Show sont sollicités pour appartenir au premier comité d’animation des équipes nationales de Côte d’Ivoire. À la Coupe d’Afrique 1984 en Côte d’Ivoire, Alan figure en bonne place dans ce comité d’animation. Une année après, des dissensions internes créent une rupture au sein du Gabi Show. Les autres membres préfèrent s’éloigner du Comité d’animation de soutien aux équipes nationales. Alan Bill choisit d’y rester pour poursuivre cette aventure qui l’emmènera en Égypte pour la CAN 86 et dans bien d’autres rendez-vous auxquels les équipes nationales ivoiriennes prenaient part.
De l’avènement du zouglou
L’avènement du multipartisme en Côte d’Ivoire, avec ce que cela comportait comme soif de liberté d’expression, a suscité chez les amateurs de l’ambiance facile un besoin de se faire entendre à travers de vraies oeuvres musicales, soit en dénonçant les tares de la société, ou en racontant des anecdotes remplies de leçons de vie. En 1991, Alan Bill se joint à Débolo Denis Pacôme et Zahui Lopèz, deux de ses compères du Gabi Show que Bloco a rejoint pour créer le groupe Esprit de Yop en 1991. Avec leur titre Amougué-Amougué, ils se font une place dans ce milieu zouglou qui vibre désormais aux rythmes de nouveaux groupes.
La dernière aventure hexagonale
Après trois albums, Alan Bill entame une carrière solo. L’on retiendra qu’en 2000, à la faveur du coup d’Etat de 1999, Alan et Nicaise, transfuge du groupe Les Bisons, ont formé un duo pour un featuring intitulé ”El Mutino”. Au cours d’une tournée européenne, les deux artistes envisagent de plus en plus de résider en Europe. Nicaise dépose ses valises à Londres. Quant à Alan Bill, ses nombreux voyages en France ont fini par l’obliger à y résider en 2021. Sur place, il a connu le bonheur du mariage sans toutefois s’éloigner du milieu de la musique. Il était d’ailleurs le président de la Famille Zouglou de la Diaspora (FAZDI). Alan Bill part, laissant derrière lui une femme, trois enfants et des artistes… inconsolables!
