Depuis le 23 mars – jusqu’au 27 mai – la Fondation Donwahi accueille « Esprit du guerrier », une exposition consacrée au peintre espagnol Antoni Clavé.
Après une première étape en Italie, au Palazzo Franchetti – pendant la Biennale de Venise en 2022 – c’est au tour de la Fondation Donwahi pour l’art contemporain de mettre à hauteur d’yeux les œuvres du peintre Antoni Clavé en Côte d’Ivoire. Il s’agit de faire découvrir ou redécouvrir le travail du maître espagnol en terre africaine, tout en renouant le dialogue qu’il avait tissé, par son travail, avec l’art africain au début des années 1960. Cette exposition, il faut en convenir, rappelle les liens indéfectibles qui unissent l’art traditionnel africain à l’art moderne et contemporain.
« Grand ami du peintre Picasso, Antoni Clavé fait partie de cette génération d’artistes qui a migré en France. Ces artistes ont été influencés par tout ce qui est masque et statuaire ouest-africains. C’est le lien qui nous intéressait en tant que Fondation pour valoriser un peu nos arts classiques, qu’on a appelés à un moment donné les arts primitifs qu’on néglige », explique la directrice de la Fondation, Illa Ginette Donwahi. Elle ajoute : « l’importance aussi pour nous, c’est l’aspect pédagogique même localement, pour qu’on se rende compte de nous-mêmes de l’importance de tous ces objets qui ont structuré nos sociétés et qu’on abandonne peu à peu. Ce que je tiens à dire, à partir du moment où ils ont découvert des masques de manière accidentelle par des marchands à Paris, cela a révolutionné leur manière de peindre. Il y a une période qu’on appelle l’ère moderne en peinture », ajoute la patronne des lieux. A l’en croire, l’enjeu de la collaboration entre son institution et la famille du peintre espagnol – décédé en 2005 – est déterminant.
Les œuvres du peintre Antoni Clavé qui attendent les férus d’art sur les cimaises de la Fondation, offrent un regard inédit sur la tradition séculaire et de bravoure du continent, terre de fiers guerriers, et mémoire du moyen-âge africain. « L’esprit du Guerrier » est un digne héritier de l’âge d’or espagnol qui relie deux mondes, de Venise à Abidjan.
Ce thème des guerriers occupe, selon les exégètes, une place particulière dans la création d’Antoni Clavé, notamment par rapport aux statues et masques africains dont il s’entoure dans son atelier parisien. Les premières sculptures en bronze qu’il réalise en 1960 représentent déjà des guerriers. Ils figurent également dans ses objets assemblages, ses « armoires », et à l’échelle gigantesque ils sont toujours les sujets, avec les rois, de ses « assemblages de tapisserie ».
Né à Barcelone en 1913, Antoni Clavé a été confronté à la guerre dès 1937. Le thème du guerrier se retrouve très tôt dans son art et figure parmi les sujets qui lui assurent la reconnaissance du public à Paris en 1958. Au contact de sculptures et de masques africains dont Clavé s’entoure dans ses ateliers, la figure du guerrier demeure fondamentale. Titre et sujet fétiches de l’artiste, le guerrier, tel un refrain, peut se lire comme une image rémanente dans les sculptures, les peintures, les assemblages de textiles ou de bois de Clavé jusqu’au début des années 2000. Ce thème le hantera donc toute sa vie.
M’Bah A.
