La Tunisie, l’un des pays africains les plus touchés par le bouleversement climatique, a décidé d’interdire l’utilisation de l’eau potable dans l’agriculture pendant six mois.
Au vu de la fréquence des années de sécheresse qui a eu un impact négatif sur les réserves des barrages au point d’atteindre un niveau de faiblesse sans précédent, le ministère tunisien de l’Agriculture, de la Pêche et des Ressources Hydrauliques a édité, le 31 mars, un arrêté interdisant – avec effet immédiat – l’utilisation de l’eau potable par le secteur agricole sur une période de six mois, allant jusqu’en septembre 2023. Cette nouvelle disposition s’applique également à d’autres activités, dont l’irrigation des espaces verts, le nettoyage des rues et des espaces publics, ainsi que le lavage des véhicules.
La Société Nationale d’Exploitation et de Distribution des Eaux (Sonede) pourra procéder sans préavis à l’arrêt de l’alimentation et à l’engagement des poursuites judiciaires contre les contrevenants à cette mesure qui risquent de six jours à neuf mois d’emprisonnement et des amendes de 60 à 1 000 dinars (18 à 300 euros).
L’initiative intervient dans un contexte marqué par la persistance de la sécheresse qui a conduit à une faible disponibilité de l’eau avec les réserves des barrages qui ont atteint un niveau bas. Selon Hamadi Habib, haut fonctionnaire du ministère de l’Agriculture, le pays du Jasmin a enregistré une baisse du stock d’eau de ses barrages à environ 1 milliard de mètres cubes, soit 30 % de leur capacité globale de stockage, face à l’absence de pluie qui dure depuis septembre 2022.
Si la décision de l’Etat vise à rationaliser l’utilisation de l’eau qui devient de plus en plus rare, elle devrait inversement renforcer la pression déjà existante sur l’appareil productif au sein du secteur agricole. « La récolte de céréales de la Tunisie sera désastreuse. Avec la sécheresse, la production devrait se situer entre 200 et 250.000 tonnes cette année, contre 750.000 tonnes en 2022 », avertit Mohamed Rjaibia, un haut responsable du Syndicat des agriculteurs qui se confiait à Reuters par rapport à la situation. Pour rappel, 80 % du stockage d’eau en Tunisie est utilisé par le secteur agricole.
Haffiny N’GUESSAN (stagiaire)
